SEL obligatoire pour les commissaires de justice ?

L’ordonnance du 8 février 2023 a réformé les règles relatives à l’exercice en société des professions libérales réglementées.

À compter du 1er septembre 2024, les professions judiciaires et juridiques (avocats, avocats au Conseil d’État et à la Cour de cassation, notaires, commissaires de justice, administrateurs et mandataires judiciaires, greffiers des tribunaux de commerce) ne pourront plus constituer de sociétés commerciales traditionnelles (une société à responsabilité limitée ou une société par actions simplifiée par exemple). Ils devront obligatoirement se tourner vers les sociétés d’exercice libéral (SEL).

 

Une société d’exercice libéral (SEL), c’est quoi ?

Une société d’exercice libéral (SEL) permet aux professions libérales d’exercer leur activité sous la forme d’une société de capitaux. La SEL peut prendre quatre formes, à savoir :

• la société d’exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) ;

• la société d’exercice libéral à forme anonyme (SELAFA) ;

• la société d’exercice libéral par actions simplifiée (SELAS) ;

• la société d’exercice libéral en commandite par actions (SELCA).

L’objet social d’une SEL est donc l’exercice en commun de la profession libérale exercée par les associés (ou actionnaires). Seules les professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé sont concernées. C’est le cas du commissaire de justice.

À partir du 1er septembre 2024, en tant que commissaire de justice, vous devrez créer une SEL. Vous aurez jusqu’au 31 août 2025 pour vous mettre en conformité si vous êtes déjà en exercice.

Vous ne pourrez plus créer une société à responsabilité limitée (SARL), une société anonyme (SA), une société par actions simplifiée (SAS) ou une société à commandite par actions (SCA). Ces formes juridiques seront soumises automatiquement à la réglementation des SEL correspondantes, c’est-à-dire :

• SARL -> SELARL ;

• SA -> SELAFA ;

• SAS -> SELAS ;

• SCA -> SELCA.

Quel est le fonctionnement d’une SEL ?

Une SEL peut compter trois types d’associés :

• l’associé professionnel exerçant au sein de la SEL ;

• l’associé professionnel extérieur à la société ;

• l’associé tiers non professionnel.

Un professionnel exerçant est une personne physique qui a la qualité pour exercer la profession concernée et qui l’exerce en toute indépendance. Il est soit associé directement ou par l’intermédiaire d’une société de participations financières de professions libérales (SPFPL) et doit détenir plus de la moitié du capital social.

 

À noter

À compter du 1er septembre 2024, vous pourrez émettre des actions à droits de vote double aux actionnaires exerçant en dehors de la SEL ou à une autre partie des actionnaires qui exercent au sein de la SEL.

 

Le montant du capital social de la SEL dépend de sa forme juridique : libre pour la SELARL et la SELAS et 37 000 euros au minimum pour la SELAFA et la SELCA.

Bon à savoir

À partir du 1er septembre 2024, vous pourrez organiser librement le fonctionnement de vos comptes courants d’associés.

 

Certains mandats sont réservés aux associés exerçant dans la SEL, c’est le cas pour :

• le gérant d’une SELARL ;

• le président de la SELAS ou du conseil d’administration ou de surveillance ;

• un membre du directoire ;

• le directeur général ;

• les 2/3 des membres du conseil de surveillance ou du conseil d’administration.

 

À compter du 1er septembre 2024, votre SEL devra envoyer chaque année certains documents à son ordre professionnel. À savoir :

• un exemplaire des statuts à jour ;

• un état récapitulant la composition de son capital social ;

• un état de répartition des droits de vote ;

• une copie des documents contenant certaines clauses ayant été modifiées au cours de l’exercice.

 

Quel est le régime fiscal et social d’une SEL ?

 

Les SEL sont soumises à l’impôt sur les sociétés (IS), sauf la SELARL unipersonnelle qui est à l’impôt sur le revenu (IR). Toutefois, elle peut opter pour l’IS.

Le résultat fiscal des SEL est déterminé selon les règles des bénéfices industriels et commerciaux (BIC).

Les dirigeants des SELAFA et SELAS et les gérants minoritaires de SELARL bénéficient du régime social des assimilés salariés.

Quant aux gérants majoritaires de SELARL et aux dirigeants de SELARL unipersonnelle et de SELCA, ils relèvent du régime des travailleurs non salariés.

La part de dividendes perçus par un associé, son conjoint, son partenaire de Pacs ou ses enfants mineurs non émancipés, supérieure à 10 % du capital social, des primes d’émissions et des sommes versées en compte courant est soumise aux cotisations sociales.

 

Est-il possible de transmettre les titres d’une SEL ?

 

Oui, néanmoins les règles dépendent de la forme juridique.

Dans la SELARL, la cession de parts sociales à des tiers requiert l’obtention d’un agrément donné à la majorité des 3/4 des associés exerçant au sein de la SEL. C’est la même règle dans la SELAS, mais la majorité retenue est celle des 2/3.

Dans la SELAFA, ce sont les statuts qui fixent les modalités des cessions d’actions.

Quant à la SELCA, les modalités dépendent de la qualité du nouvel associé :

• actionnaire commanditaire : agrément à la majorité des 2/3 des associés commandités ;

• actionnaire commandité : agrément à l’unanimité des associés commandités et à la majorité des 2/3 des actionnaires commanditaires.

 

À noter

À compter du 1er septembre 2024, les statuts pourront prévoir les modalités de retrait des associés.

 

Quel est l’impact de la réforme sur la SEL pour les commissaires de justice ?

 

En tant qu’associé au sein d’une société de droit commun, votre responsabilité va être élargie avec cette réforme. En effet, même si les SEL suivent la plupart des règles découlant du régime de la société commerciale attachée (par exemple la SELARL a un régime similaire à la SARL), certaines modalités diffèrent.

Par exemple, si vous avez une SARL, elle se verra appliquer le régime de la SELARL. Dans les deux formes, la responsabilité des associés est limitée à leurs apports. Toutefois, l’enjeu principal est en cas de faute. En effet, le gérant de la SARL voit sa responsabilité personnelle engagée en cas de faute de gestion alors que l’ensemble des associés de SELARL peuvent voir leur responsabilité personnelle engagée en présence d’une faute professionnelle.

Dans le cadre d’une SAS, elle suivra le régime de la SELAS. Avec la SAS, la responsabilité des associés est limitée au montant des apports. En revanche, l’ensemble du patrimoine des associés d’une SELAS est exposé aux aléas de l’activité, c’est-à-dire même leur patrimoine personnel.

De plus, le dirigeant d’une SAS peut choisir librement entre la perception d’une rémunération en sa qualité de dirigeant ou le paiement sur la distribution des dividendes. La rémunération est soumise aux cotisations sociales et non, les dividendes. Avec la SELAS, des cotisations sociales seront dues sur une partie des dividendes. > en savoir plus sur les incidences fiscales

 

Pour en savoir plus sur les conséquences de l’ordonnance du 8 février 2023 pour l’exercice de la profession de commissaire de justice, contactez les équipes comptable et juridique d’Exentys, dédiées au métier d’huissier.

 

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